mercredi 21 mars 2012

Aloïs Nebel


Voilà un étrange objet filmique venu de République Tchèque. Le film a été réalisé selon le principe de la rotoscopie, qui consiste à dessiner les plans tournés en prises de vue réelles, permettant ainsi de respecter la fluidité des mouvements et de garder l'expression des visages des acteurs. Aloïs Nebel est donc une entreprise singulière, un film déroutant, pas toujours accessible mais très intriguant.

Nous sommes en 1989, au moment de l'effondrement du régime soviétique et de l'élection du nouveau président de Tchécoslovaquie, Vaclav Havel. Loin de ces bouleversements politiques, Aloïs Nebel est chef de gare dans une petite station tchèque, non loin de la frontière polonaise. L'irruption d'un étranger va l'obliger à affronter son passé. 


Le réalisateur Tomas Lunak, dont c'est le premier long métrage, réalise une véritable prouesse esthetique. D'un noir et blanc envoûtant, le film est baigné dans une atmosphère de déliquescence, à l'image de la vie d'Aloïs Nebel qui n'a plus que ses traumatismes d'enfance auxquels se raccrocher. L'homme n'est pas bavard et demeure énigmatique. La rencontre avec une femme dans la gare de Prague va soudainement révéler sa touchante humanité. 

Tomas Lunak possède un étonnant sens de l'image et du mouvement, transformant ses décors en puissantes réminiscences de la seconde guerre mondiale, et devenant, le temps d'une superbe séquence, le théâtre des lendemains qui chantent. Le réalisateur met les changements de son pays au second plan, accompagnant subtilement la trajectoire de son personnage. Le cinéaste aurait pu cependant rendre son intrigue et ses enjeux davantage lisibles et l'on perd pied plus d'une fois devant cette histoire un brin alambiquée. Mais la sincérité de la démarche et le talent de Tomas Lunak emportent l'adhésion. Une véritable curiosité. 

Antoine Jullien 

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