mardi 1 mai 2012

Babycall


Noomi Rapace a marqué au fer rouge les spectateurs qui ont pu la découvrir sous les traits de Lisbeth Salander dans l'adaptation suédoise du best-seller Millenium. L'intensité de son regard mêlé à sa gestuelle si singulière promettaient une ascension fulgurante. Avant de la retrouver en archéologue à la recherche de nos origines dans le mystérieux Prometheus (voir article), elle campe, dans Babycall, une mère aux abois,  en proie à de troublantes hallucinations. Un rôle fort pour une comédienne qui ne semble avoir aucune limite et qui fait à nouveau sensation. 

Anna s'est réfugiée dans un logement social avec Anders, son fils de 8 ans. Terrifiée à l'idée que son ex-mari ne les retrouve, elle achète un babyphone pour être sûr qu'Anders soit en sécurité pendant son sommeil. Mais des cris d'enfant, provenant d'un autre appartement, viennent parasiter le babycall. 

Noomi Rapace 

Le réalisateur norvégien Paul Slataune ne masque pas ses influences, d'Hitchcock à Polanski. On ressent en effet une prégnante atmosphère de claustration renforcée par un cadre et des ambiances très réalistes. La banalité du décor est un contre-point judicieux au sentiment de paranoïa vécu par l'héroïne. Car si Anna est légitiment terrorisée par une menace extérieure, ses attitudes étranges et la froideur de son regard interrogent le spectateur sur la véracité de ce qu'elle raconte. 

La frontière entre le réel et l'imaginaire est savamment entretenue par le réalisateur qui privilégie une mise en scène épurée au service de ses personnages. L'horreur est hors-champ mais Paul Slataune la suggère de manière glaçante, des hurlements d'un enfant inconnu au comportement ambigu d'un assistant social. Anna est de plus en plus livrée à elle-même à mesure qu'elle s'enferme dans une solitude que tente de rompre le vendeur du babycall, sobrement incarné par Kristoffer Joner. En réunissant ces deux protagonistes, le cinéaste aborde le thème qui parcourt tout le film, l'enfance meurtrie et ses plaies indélébiles. Mais le cinéaste a préféré ménager un retournement de situation qui ne convainc guère et qui amoindrit la portée du film. Un choix regrettable car la profonde tristesse qui se dégage de Babycall et la présence inquiétante de Noomi Rapace auraient presque justifié le Grand prix qu'il a obtenu lors du dernier festival de Gérardmer. 

Antoine Jullien

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