mardi 12 août 2014

La mort de Robin Williams


"Ô capitaine, mon capitaine". Cette fameuse réplique du Cercle des poètes disparus a marqué durablement la carrière de Robin Williams dont on vient d'apprendre la mort à l'âge de 63 ans. Ce rôle du professeur Keating, le rebelle d'une institution scolaire trop rigide pour cet esprit libertaire, a marqué un changement majeur dans l'image que l'on avait alors du comédien. En effet, Robin Williams, issu du stand-up, s'était surtout illustré dans des personnages à la vis comica affirmée, notamment celui de Good Morning Vietnam, son premier grand succès personnel, dans lequel il interprétait avec un abattage sidérant un animateur radio de l'armée américaine chargé de distraire ses collègues avec un ton irrévérencieux qui va rapidement le rendre populaire. 

Par la suite, l'acteur triomphera dans de nombreuses comédies, dont la plus célèbre et la plus réussie, Madame Doubtfire, lui vaudra de remporter un Golden Globe. Après plusieurs tentatives infructueuses, il faudra attendre 1998 pour que l'acteur ne décroche l'unique Oscar de sa carrière, celui du meilleur second rôle pour Will Hunting de Gus Van Sant. Ce rôle de psychologue sensible à l'écoute d'un jeune homme en difficulté prouvait à tous ses détracteurs que le comédien pouvait faire preuve d'une grande sobriété, lui qui s'était parfois fourvoyé dans des projets ineptes où son cabotinage finissait par irriter, et avait déçu lors de ses collaborations avec des prestigieux cinéastes, que ce soit avec Steven Spielberg pour Hook ou Francis Ford Coppola avec Jack. 


Photo Obsession (2002)

A l'orée des années 2000, le comédien décide de changer de registre en développant une face plus sombre de sa personnalité. En 2002, il apparaît coup sur coup dans Photo Obsession de Mark Romanek et Insomnia de Christopher Nolan. Dans le premier, il incarne un homme travaillant dans un laboratoire photo d'un supermarché qui se met peu à peu à faire une fixation sur l'une des familles dont il développe les clichés. Métamorphosé, l'acteur est particulièrement angoissant tout comme dans Insomnia où il joue un tueur qui fait un odieux chantage au flic qui le traque interprété par Al Pacino. Dans ce grand polar glacial, Robin Williams semble se délecter de ce personnage d'écrivain raté et frustré. 

Après ses deux interprétations majeures, le comédien se fera plus discret sur les écrans, n'apparaissant que dans des seconds rôles de luxe (La Nuit au Musée) ou lors de brefs caméos (il incarne Einsenhower dans Le Majordome). On retiendra en revanche World's Greatest Dad de Bobcat Golthwait, tourné en 2009 et inédit en France, où il est un père s'appropriant l'oeuvre littéraire de son fils décédé. Même si le film n'était pas tout à fait à la hauteur de son pitch, l'acteur montrait encore qu'il pouvait varier les registres. Son décès brutal, dû probablement à un suicide, montre tristement que derrière le sourire du clown se cachait des démons intérieurs. Qu'ils n'entachent pas la mémoire de ce grand caméléon, imitateur hors pair (il fut la voix du Génie dans Aladin) que l'on pourra encore découvrir dans plusieurs films à sortir prochainement, qui aimait à dire à propos de ses addictions : "La cocaïne est une manière pour Dieu de vous faire comprendre que vous gagniez trop d'argent". 

Filmographie sélective 

1980 : Popeye de Robert Altman
1982 : Le Monde selon Garp de George Roy Hill
1987 : Good Morning, Vietnam de Barry Levinson
1988 : Les aventures du baron de Munchausen de Terry Gilliam
1989 : Le cercle des poètes disparus de Peter Weir
1990 : L'éveil de Penny Marshall
1991 : Fisher King de Terry Gilliam / Hook de Steven Spielberg
1992 : Toys de Barry Levinson / La voix du Génie dans Aladin
1993 : Madame Doubtfire de Chris Colombus
1995 : Jumanji de Joe Johnston
1996 : The Birdcage de Mike Nichols / Jack de Francis Ford Coppola
1997 : Will Hunting de Gus Van Sant / Harry dans tous ses états de Woody Allen
1999 : Jakob le menteur de Peter Kassovitz
2002 : Insomnia de Christopher Nolan / Photo obsession de Mark Romanek
2004 : Final Cut d'Omar Naim
2006 : Man of the year de Barry Levinson / La nuit au musée de Shawn Levy
2009 : World's greatest dad de Bobcat Golthwait
2013 : Le Majordome de Lee Daniels
2014 : The face of love d'Arie Posin / The angriest man in Brooklyn de Phil Alden Robinson