mardi 24 février 2015

Vincent n'a pas d'écailles

 
Le mariage de déraison entre la critique et le jeune cinéma d'auteur français est en train d'atteindre un point de non retour.  On l'observe ici et là depuis quelques temps avec une sidération de plus en plus grande. Il n'est pas ici question de tout jeter aux orties mais de faire preuve d'un minimum d'objectivité même si le terme peu paraître impropre à la critique, forcément subjective. Le dernier avatar de cette tendance est l'accueil hallucinant réservé au premier long métrage de Thomas Salvador, Vincent n'a pas d'écailles, que l'affiche décrit comme "le premier film de super-héros 100% français". Au risque de voir s'étrangler les fans du genre. 

Vincent a un pouvoir extraordinaire : sa force et ses réflexes décuplent au contact de l'eau. Pour le vivre pleinement, il s'installe dans une région riche en lacs et rivières. Mais il tombe amoureux de Lucie qui va découvrir ce don mystérieux.

Thomas Salvador et Vimala Pons

Le réalisateur, qui interprète également le rôle titre, veut apporter sa pierre à l'édifice des super-héros et croit y parvenir en s'en démarquant ostensiblement. Décors réalistes, scènes de la vie quotidienne, absence de dialogues : la démarche a le mérite de la clarté. Une louable intention qui, malheureusement, procure l'effet inverse de celui recherché. On se laisse pourtant vaguement séduire au début, intrigué par la tonalité insolite du film. Vincent ne déborde pas de charisme, c'est un euphémisme, mais ses plongées aquatiques successives (réalisées sans trucages numériques) lui permettant de retrouver ses pouvoirs amusent un tantinet. Pas longtemps, hélas.

Victime d'un scénario inexistant et incroyablement mal construit, le réalisateur enfonce le clou avec une mise en scène très minimaliste. Une posture que Thomas Salvador imagine audacieuse et qui est en réalité d'une confondante pauvreté. Car pour faire vivre des plans aussi statiques, encore leur faudrait-il de la matière. Or le cinéaste n'a aucune idée à proposer ni de fantaisie à offrir qui auraient permis de nous raccrocher un tant soit peu à l'intrigue anémique. Faute de personnages qui demeurent des figurines et d'enjeux consistants, le spectateur subit le rythme terriblement chancelant du film jusqu'à un final qui n'est pas très loin du grand foutage de gueule. Une toute petite chose en somme qui aurait dû plutôt accoucher d'un court métrage. Que la presse lui tresse de tels lauriers n'est vraiment pas lui rendre service, ni à son réalisateur ni au public. Une imposture qui ne mérite aucune dithyrambe.

Antoine Jullien

France - 1h18
Réalisation : Thomas Salvador - Scénario : Thomas Salvador, Thomas Cheysson et Thomas Bidegain.
Avec : Thomas Salvador (Vincent), Vimala Pons (Lucie), Youssef Hadji (Driss). 


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