mercredi 15 février 2012

La Désintégration


Intituler son film La Désintégration ne manque pas d'audace lorsqu'il s'agit d'évoquer l'immigration française. Un sujet pouvant prêter à toutes les polémiques que la rigueur de Philippe Faucon exclue de facto. Le réalisateur s'est installé au coeur d'une cité lilloise pour raconter la trajectoire d'individus pris dans le piège de l'obscurantisme. Un parcours édifiant et terrifiant qui pose question. 

Ali, Nasser et Hamza, âgés d'une vingtaine d'années, font la connaissance de Djamel, dix ans de plus qu'eux. Habile manipulateur, il endoctrine peu à peu les trois garçons avant de les entraîner vers une destinée terroriste irréversible. 

Rashid Debbouze 

Philippe Faucon explore la conséquence la plus tragique du sentiment de rejet en filmant des jeunes gens influençables qu'un esprit retors va peu à peu faire sortir de la légalité. Dans un premier temps, Ali (interprété par Rashid Debouzze) veut trouver du travail et mener une vie stable mais les barrières s'accumulent et le jeune homme tombe alors dans un terrible cercle vicieux. Philippe Faucon ne perd pas de temps et dans une durée courte (1h20) raconte un basculement qui paraît cependant trop rapide. Ce relatif manque de crédibilité se retrouve aussi dans le personnage de Djamel qui semble réciter son texte. La faute à un casting composé essentiellement d'acteurs non professionnels qui manquent parfois de conviction. 

Evitant le mieux possible les clichés, Philippe Faucon entoure Djamel de son frère et de sa soeur qui sont dépeints comme des réussites de l'intégration. Le cinéaste a le mérite de ne pas tomber dans un tableau complaisant et uniquement négatif de la société tout en se défendant de juger ses personnages en montrant peu à peu l'embrigadement idéologique dont vont ils êtres d'abord les victimes avant d'en être les exécutants. Pour pallier le manque de moyens évident, le cinéaste opte pour une caméra numérique impersonnelle et pour le hors-champ, en particulier dans les dernières séquences. Mais le cri final de la mère d'Ali " Ils me l'ont tué" soulève soudainement une réelle ambiguité amplifiée par l'utilisation douteuse des images du conflit israélo-palestinien. Si Philippe Faucon filmait l'escalade dans la violence et la culture de la haine avec un certain recul, il finit par les expliciter et prend ainsi le risque de légitimer les actes de ces jeunes gens. Un point de vue équivoque qu'illustre un propos schématique et didactique que le cinéaste avaient réussi à éviter. 

Antoine Jullien

1 commentaire:

  1. D'accord avec toi sur l'aspect équivoque du film. Je trouve que le scénario est un peu faiblard sur la fin surtout.

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